Autoformation
L'autoformation est le fait pour une personne de se former elle-même, dans un cadre qui lui est propre, d’une façon plus ou moins éloignée des structures et institutions enseignantes et formatives.
Si l'autodidacte est habituellement présenté comme une personne poursuivant une démarche solitaire, il est de plus en plus facile de trouver des ressources d'autoformation collective : groupe d'échange de savoirs, réseaux sociaux d'apprentissage... Les courants de l'éducation populaire, l'université populaire, les réseaux d'échange réciproque de savoir et les phénomènes collaboratifs comme le wiki, illustrent ce phénomène important de la société du XXIe siècle.[réf. nécessaire] À l'inverse, l'auto-formation est souvent conduite au savoir grâce à la pratique. C'est en réalisant les choses, donc en « mettant la main à la pâte » que l'autodidacte acquiert des connaissances, d'où l'importance de l'apprentissage par la pratique.
Sommaire
1 Lectures théoriques
2 Déclinaison pratique
3 Sociologie
4 Courants d'auto-formations
4.1 Autoformation intégrale
4.2 Autoformation existentielle
4.3 Autoformation éducative
4.4 Autoformation sociale
4.5 Autoformation cognitive
5 Notes et références
6 Voir aussi
6.1 Bibliographie
6.2 Articles connexes
6.3 Liens externes
Lectures théoriques |
Pour Joffre Dumazedier, le concept d'autoformation est un concept ambigu. S'il permet d'appréhender les pratiques du sujet de ce qu'il a nommé « la société des loisirs », il a ses limites et n'est pas sans danger en ce qu'il peut alimenter le mythe d'un auto-engendrement. En fait d'auto-engendrement, "on apprend seul mais jamais sans les autres". L'autodidacte serait en fait un sociodidacte envisageant l'autre simultanément en tant que ressource et que destinataire des informations qui s'élaborent dans un contexte social[1].
Jean-Jacques Rousseau, qui se revendique d'autodidaxie, avait déjà entrevu cet écueil. Sa théorie des trois maîtres (nature-hommes-choses) se rapproche de la théorisation de Gaston Pineau, qui propose un triangle de l'auto-formation reposant sur trois pôles (eco, le monde - hetero, les autres - auto, soi même).
Enfin, pour le pédagogue Philippe Meirieu, « il n'y a d'apprentissage véritable qu'en autoformation ». Ces différents auteurs s'attachent ainsi à affirmer la formation comme l'acte d'un sujet désirant qui peut se former avec, contre ou sans les institutions éducatives[2].
Georges Le Meur indique que dans la modernité « la lutte contre l'obsolescence des savoirs professionnels provoque l'apparition d'un autodidacte nouveau » et il développe le concept de néo-autodidaxie. Celle-ci « désigne un phénomène éducatif majeur de la société post-industrielle […] qui appelle des apprentissages ininterrompus de savoirs récents dans tous les domaines ». Ainsi aujourd’hui la néo-autodidaxie recouvre la démarche pédagogique qui consiste à assurer soi-même l'acquisition de connaissances choisies en principe hors des systèmes éducatifs, donc sans enseignant ».
Au XXIe siècle, de nouvelles potentialités et les souhaits d'autonomie autorisent des cursus de formation dans l'agir quotidien. Ainsi, le nouvel autodidacte peut recevoir le savoir à domicile [(France Henry)] par des médias multiples, garantissant ses acquisitions hors des organismes qu'il prend parfois en compte. De nos jours « L'autodidaxie se révèle un mode d'apprentissage existentiel ou cognitif dans lequel le sujet social apprenant conserve toutes les responsabilités sur son action formative ». Le nouvel autodidacte exerce toujours un pouvoir total sur ses activités éducatives.
En 2016, parait Apprendre par soi-même aujourd’hui. Les nouvelles modalités de l'autoformation dans la société digitale sous la direction de Marc Nagels et Philippe Carré[3]Source insuffisante . Cet ouvrage vient consolider et actualiser les connaissances sur l'autoformation à la lumière de l'usage des ressources numériques. L'autoformation se voit analysée sous trois angles spécifiques : l'environnement, avec l'influence du milieu familial et professionnel ; les ressources et le rapport aux ressources numériques ou sociales mobilisées par l'autoformation ; l'approche cognitive qui met l'accent sur l'organisation cognitive de l'activité d'autoformation et les ressources individuelles d'auto-efficacité. Les résultats, après étude de 80 entretiens renforcent la perspective de l'apprenant devenu particulièrement capable de diriger ses apprentissages, opportuniste dans la gestion des ressources et combinant au service de ses buts les apports des dispositifs formels et informels dans leurs formes les plus récentes. Ceci amène à penser que cette notion d'autoformation relève de l'un des processus d'apprentissage chez l'adulte.
Déclinaison pratique |
L'étude de l'APEC sur l'acquisition de compétences en entreprise, en juin 2008[4], considère que l'autoformation est une forme d'auto-apprentissage qui peut résulter de l'acquisition de connaissances formelles comme l'observation puis la reproduction mimétique de savoir-faire et savoir-être sur le terrain ; dans ce cas il s'agit d'apprentissage informel.[5]
Parmi les caractéristiques qui ressortent d'un échantillon d'apprenants qui ont été enquêtés, il ressort que l'auto-formation est :
- un apprentissage qui se fait « naturellement »
- liée à la personnalité de l'apprenant, à son état d'esprit
- dépendant d'une démarche active souvent informelle et peu structurée.
Tiers, relations professionnelles comme extra-professionnelles, tout contact peut servir à l'« auto-apprenant ».
Sociologie |
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L'autodidaxie est souvent présentée ou imaginée comme une alternative, voire un acte de rébellion contre un système éducatif dominant, ou encore comme une nécessité dans des situations de handicap physique, géographique, financiers, etc.
Dans ces trois cas, la manière autre d'apprendre et d'être accompagné dans cet apprentissage échappe aux catégories habituelles de l'entendement. D'où l'attribution du processus et du mérite d'apprendre au seul apprenant.
Il est parfois considéré comme à part ne faisant pas partie d'un réseau, de par l'absence de « légitimité » de sa formation. Cela dit, avec des systèmes comme celui de la Validation des Acquis de l'Expérience (VAE), les autodidactes ont aujourd’hui la possibilité de donner une valeur à ce qu'ils ont appris par eux-mêmes en le valorisant par un diplôme, sous certaines conditions.
Il apparaît par exemple chez Jean-Jacques Rousseau ou encore dans Dom Juan ou le Festin de pierre de Molière, acte 3 scène 1, lorsque Sganarelle discourt avec Don Juan. Il apparaît également dans les textes de vulgarisation scientifique (essais, vade-mecum) qui font l'objet d'une réappropriation sociale de la part des classes moyennes en quête d’ascension sociale, Pierre Bourdieu appelant ce phénomène l'« autodidaxie légitime »[6].
Dans Les Nouveaux Autodidactes, Georges Le Meur signale que dans la vie quotidienne, « l'autodidacte représente souvent la réussite socio-professionnelle d'une personne qui ne devait « normalement » pas s'élever dans la hiérarchie sociale ». Toutefois, si les souhaits d'ascension sociale constituent un moteur important pour se former, il montre aussi que l'on peut apprendre de manière indépendante et sans souci de promotion. Il met en évidence des démarches de formation existentielles et/ou cognitives que le sujet pilote intégralement pour le plaisir. Il rappelle qu'autrefois le métier de base s'apprenait avec un maître et qu'à la manufacture l'autodidacte n'avait pas sa place. Les autodidactes « emblématiques » qui appartenaient à la classe dominée étudiaient dans les domaines généraux, non professionnels, et manifestaient un respect fort à l'égard de l'institution éducative. Ils s'appropriaient par des voies non scolaires le capital culturel qui leur faisait défaut.
Mais avec la massification de la formation initiale et le développement de la formation continue tout au long de la vie, la démarche d'autonomie de l'apprenant, l'auto-formation et l'autodidaxie sont devenues des exigences de l'économie. Cette dépendance de l'auto-formation aux exigences de l'économie a été interprétée par quelques sociologues critiques comme une conduite de soumission aux rapports sociaux dominants et non pas comme une démarche d'affranchissement ou encore d'émancipation individuelle. Dans cette perspective, Jacques Guigou montre comment cette « autonomisation des apprentissages » constitue une composante majeure de ce qu'il nomme « la société capitalisée » et prive l'auto-formation des dimensions libératrices que veulent y voir ses promoteurs.
Courants d'auto-formations |
Il existe 5 principaux courants de l’autoformation[7] :
Autoformation intégrale |
L’autoformation intégrale est synonyme d’autodidaxie. Il s’agit pour l’apprenant d’apprendre en dehors de tout système institutionnel de formation. Une des formes de l’autoformation intégrale, c’est la formation basée sur sa propre expérience. Ainsi, une personne qui a suivi une formation pour un CAP mécanique-automobile ne peut prétendre être autodidacte dans son métier puisqu’elle a été formée.
Autoformation existentielle |
Elle fait référence à l’histoire de vie, l’autobiographie.
À la différence de l’autodidacte qui apprend dans un rapport d’utilité extérieure (apprendre un métier, un savoir-faire…), l’autoformation existentielle vise à user de sa propre expérience pour son développement personnel. Elle dépasse donc du cadre de la formation professionnelle et nous sommes ici au niveau de l’éducation permanente.
Autoformation éducative |
Il s’agit d’apprendre au sein d’un dispositif de formation, Formation Ouverte et A Distance (FOAD), Atelier de Pédagogie Personnalisée (APP)… tout en développant son autonomie. L’enseignant-formateur n’intervient alors qu’à titre ponctuel comme un guide, facilitateur dans l’accession au savoir.
Plusieurs termes existent pour qualifier ce genre d’autoformation : l'autoformation assistée (Bertrand Schwartz), l'autoformation tutorée (Philippe Carré).
Autoformation sociale |
Il s’agit d’apprendre par le biais des réseaux sociaux constitués (ex : les cercles d’études) en dehors des systèmes de formation formalisés. Chaque personne est libre d’adhérer ou non.
L’autoformation est réalisée grâce au caractère collectif des échanges et des interactions sociales.
Autoformation cognitive |
Il s’agit du rapport à la métacognition « apprendre à apprendre ». L’intérêt est porté sur la manière dont la personne réalise son propre apprentissage. C’est une sorte de méthodologie de l’apprentissage individuel.
Notes et références |
Denis Cristol, Dictionnaire de la formation à l'ère du numérique, Paris, ESF, 2018, 240 p., p. 179
Pascal Galvani, quête de sens et formation, l'Harmattan, 1998
Nagels Marc, Carré Philippe, Apprendre aujourd’hui. Les nouvelles modalités de l'autoformation dans la société digitale, Paris, Éditions des Archives contemporaines, 2016, 166 p. (ISBN 9782813002211)
« L'acquisition des compétences en entreprise », sur cadres.apec.fr, 2 juillet 2015(consulté le 27 octobre 2017)
Denis Cristol, Anne Muller, « Les apprentissages informels dans la formation pour adultes », Savoirs, 2013, p. 11-59 (lire en ligne)
Pierre Bourdieu, La Distinction : critique sociale du jugement, Minuit, 1979, p. 23-24
Philippe CARRE, André MOISAN, Daniel POISSON (2002), L’autoformation. Psychopédagogie, ingénierie, sociologie, Paris, PUF collection « Éducation et Formation »
Voir aussi |
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Bibliographie |
- Georges Le Meur et al, Université ouverte, formation virtuelle et apprentissage, communications francophones du cinquième colloque européen sur l'autoformation, Barcelone, décembre 1999, (ISBN 2-7475-2958-4)
- Georges Le Meur, Les nouveaux autodidactes. Néoautodidaxie et formation, 1998.
- Jacques Guigou, « L'autonomisation des apprentissages dans la société capitalisée" » in, Le Meur G. (dir.), Université ouverte, formation virtuelle et apprentissage. L'Harmattan, 2002, p. 23-31. (ISBN 2-7475-2958-4). Texte disponible en ligne http://tempscritiques.free.fr/spip.php?article104
- Georges Le Meur, Construire ma Recherche, Joffre Dumazedier chercheur-accompagnateur, 2004.
(en) Brown, Resa Steindel ; The Call to Brilliance: A True Story to Inspire Parents and Educators. (ISBN 0-9778369-0-8).
(en) Cameron, Brent et Meyer, Barbara ; SelfDesign: Nurturing Genius Through Natural Learning. (ISBN 1-59181-044-2).
(en) Hayes, Charles D. ; Self-University: The Price of Tuition Is the Desire to Learn. Your Degree Is a Better Life. (ISBN 0-9621979-0-4).
(en) Hayes, Charles ; The Rapture of Maturity: A Legacy of Lifelong Learning. (ISBN 0-9621979-4-7).
(en) Hailey, Kendall ; The Day I Became an Autodidact. (ISBN 0-385-29636-3).
(en) Llewellyn, Grace ; The Teenage Liberation Handbook: How to Quit School and Get a Real Life and Education. (ISBN 0-9629591-7-0).
(en) Rancière, Jacques ; The Ignorant Schoolmaster: Five Lessons in Intellectual Emancipation. Stanford Univ. Press, 1991. (ISBN 0-8047-1969-1).- Hélène Bézille, L’autodidacte, entre pratiques et représentations sociales Paris, L’harmattan, 2003
Jean-Paul Sartre, La Nausée : le personnage de l'Autodidacte.
(en) Solomon, Joan ; The Passion to Learn: An Inquiry into Autodidactism. (ISBN 0-415-30418-0).
L'autoformation. Psychopédagogie, ingénierie, sociologie, Philippe Carré, André Moisan, Daniel Poisson,
Autoformation et fonction de formateur, Pascal Galvani,
L'autoformation, Joffre Dumazedier,
Produire sa vie, autoformation et autobiographie, Gaston Pineau et Marie Michèle,
Le praticien réflexif, Donald A. Schön,
Entreprendre d'apprendre; d'une autobiographie raisonnée aux projets d'une recherche-action, Desroche Henri,
Développer de nouvelles formes de formation, Alain Mor et Jean Kuperholc.
Expérience interculturelle et autoformation existentielle, Pierre Willaume
Articles connexes |
- Formation en ligne
- Formation à distance
- Apprentissage par la pratique
- Éducation alternative
- Pédagogie
- Atelier de pédagogie personnalisée
- Ingénierie pédagogique
- Maîtrise d'usages professionnels
- Standards : SCORM, AICC, LOM
- Université numérique
Wikiversité, Wikipédia
- Formation ouverte et à distance
Liens externes |
Site de l'Association du groupe de recherche sur l'autoformation [archive]
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